Je reviens de près de
quatre mois d’exil volontaire, loin de tout ce que je croyais indispensable.
Après mon article du 19 février (Vers la troisième guerre mondiale ?), le
dernier paru sur ce site, j’éprouvais une oppressante impression d’étouffer.
Quatre mois, sans
électricité donc sans téléphone, sans wifi, sans internet quatre mois à
réfléchir sans aucune intervention extérieure, avec pour seuls contacts humains
la visite de deux personnes qui m’apportaient des fruits et des légumes, une
fois par semaine, le mercredi, et qui ne comprenaient aucune des langues que je
parle.
Quatre mois sans autre
bruit que celui du cours d’eau qui coulait près de ma cabane en rondins. Et le
chant des oiseaux. Et, la nuit, les appels des animaux.
La première semaine a été
celle d’un repos intense. Je me suis ennuyé pendant les deux semaines
suivantes. Besoin de faire quelque chose, de m’occuper les mains. Puis mon
cerveau s’est habitué à fonctionner sans interventions extérieures autres que
le climat, le chant des oiseaux, et le rythme des jours et des nuits qui se
succédaient presque sans transition. Des aubes et des crépuscules si courts que
parfois je ne les remarquais pas.
Pas d’ordinateur, même
pas de papier, ne pas pouvoir écrire a été dur, parfois effrayant, au début. La
crainte de ne pas se souvenir de ses pensées les plus intéressantes. Le besoin de
fixer l’instant avec des mots. Puis on comprend que les idées les plus
importantes ne s’oublient pas, elles se simplifient, prennent de la densité en
s’affranchissant des émotions parasites. Ce que l’on oublie n’avait sans doute
pas d’importance, comment savoir ?
Pas de montre, donc pas
moyen de mesurer le temps qui passe. Mais le loisir d’y penser. Penser à cette
chose paradoxale qui n’existe que parce qu’elle disparaît. Et puis personne ne
m’obligeait à être là. Je savais que je partirai un jour, un mercredi.
Tentative de se mettre à
l’abri ? Certainement pas. Si un jour arrive l’irréparable, si les fous
prennent définitivement le pouvoir et se lancent dans leur ultime folie, je
préfère être là où on meurt. Après l’ultime embrasement, les vivant envieront les
morts…
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